Alphabétisation
:
|
définition
: les personnes de 15 ans et plus qui savent lire et
écrire
population totale :
42.7%
hommes : 55.3%
femmes : 29%
(1998) |
De
nouveaux comportements face à
l’éducation au Pakistan
Mais la qualité reste un défi
majeur, déclare Zobaida Jalal, ministre
fédérale de l’Education, Pakistan. |
Zobaida
Jalal,
ministre fédéral de l’Education,
Pakistan
|
En
matière d’éducation, quel est le
principal défi auquel votre pays doit faire face ?
Aujourd’hui,
c’est la qualité de
l’éducation, que ce soit au niveau primaire ou
élémentaire ou même au niveau de
l’enseignement supérieur. Si un enfant
n’est pas capable de lire ou d’écrire
après quatre ans de scolarité, on peut
s’interroger sur l’enseignement qu’il a
reçu.
En tant que
ministre de l’Education, quelle est la mesure que vous avez
prise dont vous êtes la plus fière ?
Pour moi, je pense que
c’est l’approche sectorielle. Pour la
première fois nous considérons
l’éducation dans son
intégralité – de
l’éducation de la petite enfance à
l’enseignement supérieur – et non pas en
se focalisant sur une seule partie comme, par exemple, juste le
primaire. Et tout le long, avec l’aide de partenaires publics
et privés, nous créons cet environnement propice.
A vrai dire, les choses commencent à bouger maintenant et
des opportunités se créent pour que les
organisations de la société civile, les
communautés, les philanthropes et les éducateurs
viennent s’ajouter aux efforts du gouvernement et
également des opportunités pour que les madrasas
(écoles islamiques) s’insèrent dans la
vie scolaire normale.
Ce dont je suis
fière, c’est que l’association de tous
les partenaires de cette approche –provinces au niveau
gouvernemental du district, individus, départements
d’éducation – va devenir une
réalité dans les années à
venir. Et toute cette approche sectorielle appartient dans une large
mesure au peuple. C’est très important.
La profession
d’enseignant est de plus en plus
dévalorisée dans le monde entier. Inciteriez-vous
vos enfants à devenir enseignants ?
Je suis
moi-même enseignante. Mon parcours professionnel est
passé par l’enseignement, puis
l’administration, pour devenir ministre. Oui,
j’inciterais vraiment mes enfants à devenir
enseignants. Parfois, je me dis, oh, c’est beaucoup
d’efforts. Et on en retire quoi ? Personnellement,
c’est ce que nous, en tant qu’enseignants,
partageons avec la communauté. C’est ce que nous
leur donnons en retour. Voilà comment la profession peut
gagner le respect et l’honneur des communautés. Ce
n’est pas seulement une question d’argent.
« J’ai posé la question aux enseignants
pakistanais : que faites-vous pour vous faire respecter en tant que
membres du corps enseignant ? Ce n’est pas qu’une
question d’argent. En tant qu’enseignants,
qu’apportez-vous à vos concitoyens ? Si vous
êtes respectables, vous serez respectés.
Aujourd’hui, au Pakistan, l’enseignement est
considéré comme un vrai métier et non
pas comme le dernier recours, la dernière chose que font les
gens quand ils ne trouvent pas de travail.
Parmi les
objectifs de réalisation de l’Education pour tous,
celui de la parité entre les sexes est pour demain (2005).
Pensez-vous que votre pays sera en mesure de l’atteindre ?
A vrai dire, nous
n’avons pas été en mesure
d’atteindre l’objectif que nous nous sommes
fixé parce que, premièrement, les ressources
économiques manquent et, deuxièmement,
l’accès et les chances
d’éducation sont moindres pour les filles que pour
les garçons au Pakistan. Avec des partenaires publics et
privés et la décision du gouvernement
d’instaurer une commission nationale pour le
développement humain, plus l’infrastructure que le
gouvernement est en train de mettre en place, tout cela contribue
à atteindre les objectifs fixés par le
gouvernement. Donc, les progrès se sont
enclenchés et d’un point de vue financier, le
budget de développement n’a jamais autant
augmenté (pour l’ouverture
d’écoles, la formation, des mesures incitatives
pour les filles, l’infrastructure, les sanitaires,
l’eau potable, etc.). Nous espérons que
d’ici à 2015 la parité entre les sexes
sera atteinte et que l’alphabétisation des adultes
sera alors de 85 %.
Quel est le
pourcentage du budget national du Pakistan alloué
à l’éducation ?
Actuellement, il est de
2,2 %. C’est très peu. Il était de 1,8
% il y a deux ans, et cette augmentation est très
significative. Mais ce chiffre n’inclut pas tout ce qui va
à l’éducation. Le ministère
de le Science et de la Technologie, le ministère du Travail
et de la Main-d’œuvre, et les technologies de
l’information mettent tous des fonds dans
l’éducation. Ces montants n’ont jamais
été comptabilisés dans le budget
éducation, mais c’est ce que l’on va
faire désormais et le pourcentage se montera à 3
%.
Lors
du Forum mondial sur l’éducation qui a eu lieu
à Dakar, la communauté internationale
s’est engagée à ce qu’aucun
pays qui ait un plan national d’EPT viable ne manque de
ressources. Selon vous, cette promesse a-t-elle
été tenue ?
Non.
Et c’est ce que l’on ne cesse de
répéter à nos partenaires donateurs.
L’UNESCO n’est pas une agence de financement, mais
au moins en tant qu’organisation « de pression
» auprès des agences bi- et
multilatérales, elle pourrait faire en sorte que
l’engagement soit respecté. Le Pakistan a
reçu beaucoup d’aide de l’USAID, mais
c’est une autre histoire. A part ça,
l’engagement de Dakar n’a pas
été tenu.
Le
VIH/sida est une entrave aux avancées de
l’éducation dans le monde entier. Que fait votre
pays pour réduire l’impact du VIH/sida sur les
enseignants, les étudiants et le personnel de
l’éducation ?
Par
la grâce de Dieu, ce n’est pas un
problème au Pakistan – pas encore. Mais ce
pourrait devenir un problème parce que nous avons beaucoup
de main-d’œuvre qui va travailler dans les Etats du
Golfe et des cas ont commencé à se
déclarer dans notre pays à leur retour. Nous
avons déjà pris des précautions : il y
a de nombreuses campagnes d’information sur le VIH/sida dans
la presse et sur Internet, et nous avons déjà
commencé à introduire le sujet dans les
programmes scolaires mêmes, dans les disciplines sociales. En
fait, beaucoup d’organisations de la
société civile vont dans les écoles
parler aux enfants qui ont 12 ans et plus.
Quel
est votre point de vue sur la libéralisation grandissante de
l’enseignement supérieur ? A-t-elle une influence
positive ou négative sur votre pays ?
Devant
le problème global des technologies de
l’information et de la communication, le Pakistan a
déjà mis en place une université
virtuelle. L’année dernière, nous avons
commencé à relier différentes
universités de différentes provinces à
l’université virtuelle. Cela a commencé
avec le pays mais va nous ouvrir des portes sur
l’international. Aussi, si quelqu’un veut se
connecter, vous ne pouvez tout simplement pas
l’arrêter même si vous le voulez.
C’est impossible. D’un côté,
cela a des aspects positifs : c’est plus
d’apprentissage, et globalement plus d’information,
pour les étudiants et les professeurs, les scientifiques et
autres. Nous voyons ça comme quelque chose de positif. Mais
naturellement la commercialisation de tout ça est un
problème. Est-ce que cela veut dire que
l’accès à l’enseignement
supérieur sera restrictif – que seule une
élite peut y accéder, ou ceux qui ont les moyens
de se l’offrir ? Et alors qu’est-ce qui se passe
avec ceux qui sont pauvres et intelligents et qui forment la
majorité du pays ? Nous devons faire en sorte que
l’enseignement supérieur concerne tout le monde.
Tout
le monde s’accorde à dire que
l’éducation est indispensable au
développement socio-économique. Si tel est le
cas, comment expliquez-vous qu’il y ait encore environ un
milliard d’adultes analphabètes ?
Pendant
des années, les priorités et les bonnes
intentions nécessaires n’ont pas
été au rendez-vous. Comme le Sous-Directeur
général de l’UNESCO pour
l’éducation l’a dit, pourquoi
l’éducation pour tous n’a-t-elle pas
été réalisée en 60 ans
d’efforts de l’UNESCO ?
L’éducation pour tous devrait être une
réalité aujourd’hui. Si l’on
considère cet aspect du point de vue du Pakistan, compte
tenu des systèmes sociaux et culturels qui existaient au
Pakistan, vous aviez un système féodal, avec son
côté conservateur, et des gens opposés
à l’éducation des filles. Je parle
d’il y a 20 ans. Mais au cours de ces 10-15
dernières années, il y a eu un revirement de
situation. Aujourd’hui au Pakistan, même dans les
zones tribales, l’éducation des femmes et des
filles est en tête de liste des demandes. Et c’est
la réalité sur le terrain maintenant.
Le
défi pour le gouvernement est de comment répondre
à la demande pour 140 millions d’individus quand
vous avez une économie sur laquelle vous ne pouvez pas
vraiment compter, sauf ces trois dernières années
– on commence à voir la fin du remboursement de
notre dette. Maintenant il y a de plus en plus d’argent qui
va vers le secteur social. Une autre chose est la volonté
politique sans précédent tant du
Président que du Premier ministre
d’éliminer l’analphabétisme.
Il faudra encore une dizaine d’années pour que le
peuple soit alphabétisé. Les structures qui
étaient en place avant rendaient cela impossible, mais
aujourd’hui nous espérons que la prochaine
décennie nous permettra de le faire.
De
toute votre vie, quel est l’événement
du domaine de l’éducation que vous
considérez être le plus marquant pour votre pays ?
Le
nouveau gouvernement qui s’est mis en place en octobre 1999,
bien que ce soit un gouvernement militaire. Mais cela a
changé la vie de beaucoup de gens au Pakistan, et
particulièrement en ce qui concerne
l’éducation. Les personnes qui ont
été nommées à la
tête des ministères, éducation ou
autres, sont des gens qui connaissaient la
réalité du terrain, des gens qui
l’avaient vécue et qui en comprenaient toute la
dimension. Ce n’étaient pas des nominations
politiques. Ensuite il y a la continuité du gouvernement.
Depuis les élections, il y a deux domaines –
l’éducation et les finances- où les
mêmes ministres ont à nouveau
été nommés. Et ça,
c’est judicieux.
Quels
conseils ou assistance dans le domaine de
l’éducation attendez-vous de l’UNESCO ?
Naturellement,
nous pensons tous que l’UNESCO devrait investir plus mais je
sais que l’UNESCO doit jouer un autre rôle. Mais
intellectuellement, l’UNESCO peut aider le Pakistan et
d’autres pays avec une assistance technique, en
renforçant les capacités des
départements d’éducation et autres
institutions. C’est très important pour nous.